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Table ronde : Alger Moderne, Alger Contemporain

by Sadok Chaieb

Dans le cadre de ses rencontres architecturales, ArchiMag vous invite à la table ronde #2 de cette saison, sous le thème de « ALGER MODERNE, ALGER CONTEMPORAIN » avec Adel Souami, architecte enseignant à l’EPAU d’Alger,
et ce le mercredi 6 novembre 2024 à 15h00 à l’ASM.

L’architecture moderne, émergée au début du XXe siècle, prônait la création d’une architecture et d’un urbanisme universels, guidés par des règles applicables en tout lieu. Son dessein était de concevoir des structures universelles, ancrées dans le principe sacré du fonctionnalisme, où la forme suit la fonction, tant à l’échelle urbaine qu’architecturale. Cela s’est traduit, à l’échelle urbaine, par une logique de zoning, séparant les espaces de travail, de loisirs et d’habitation. À l’échelle architecturale, cela a donné naissance à des formes épurées et abstraites, reproduites à l’échelle mondiale.

Cette approche a conduit à la création d’entités urbaines distinctes, répondant aux impératifs hygiénistes, mais érodant la continuité des anciens tissus urbains. Elle a également entraîné la perte de l’urbanité, qui se matérialisait dans la rue et la place, des espaces publics cruciaux pour la vie commune. À l’échelle architecturale, cette approche a généré la création dogmatique d’objets architecturaux abstraits, entraînant une fatigue et une frustration chez les architectes et les utilisateurs. Le mouvement moderne a trop souvent réduit son ambition initiale de repenser l’architecture à des formules esthétiques à reproduire.

En opposition à cette tendance destructrice de l’urbanité et de la standardisation architecturale, le mouvement moderne à Alger s’est démarqué. Bien qu’il ait emprunté au lexique international du mouvement moderne, il n’a pas sacrifié
l’urbanité. Au contraire, il a préservé la continuité entre les différentes entités urbaines à Alger et a adapté son architecture aux particularités du site.

Les formes architecturales, bien que inspirées du fonctionnalisme et du rationalisme modernes, étaient utilisées avec intelligence. Elles ne cherchaient pas simplement à reproduire des dispositifs architecturaux pour leur esthétique, mais plutôt à assurer la continuité urbaine, à s’intégrer au contexte local, à s’inscrire dans le paysage et à répondre aux spécificités climatiques d’Alger. Opérant de ce fait un glissement du dogme vers la production de sens.
Cette approche singulière du mouvement moderne à Alger, axée sur la recherche de la contextualisation plutôt que la simple adhésion dogmatique, trouve sa justification dans la configuration exceptionnelle du site algérois. Une particularité qui a imprégné chaque étape de l’histoire de ce lieu, depuis les premières implantations des Phéniciens, des Berbères, des Béni Mezghena, des Ottomans, des premiers colons français du 19e au début du 20e siècle, jusqu’à l’avènement du mouvement moderne.

Que ce soit la Médina d’Alger, le tissu dit Haussmannien ou la période moderne d’Alger, tous ont dû se plier à la loi de la morphologie particulière de ce site, s’adaptant à sa volonté indomptable. Cette force suggestive du site a été
magnifiquement exprimée par André Ravéreau dans le titre évocateur de son ouvrage sur la Casbah d’Alger, à savoir « La Casbah d’Alger, et le site créa la ville ». Une expression qui transcende les époques et les strates de l’histoire de la ville d’Alger, depuis ses fondations initiales jusqu’à l’avènement du mouvement moderne. Un principe qui ne sera pas totalement suivi par les nouvelles générations d’architectes algériens ou étrangers qui ont dû intervenir afin de répondre aux nouveaux besoins de l’Algérie indépendante.

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